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Un français à Beijing
5 septembre 2012

5 Septembre, Jour 5 :

5 Septembre, Jour 5 :


Lorsque je suis rentré hier soir, Michael était parti. Quand je me réveille ce matin, je suis toujours tout seul. Tant mieux, ça me permet de prendre mon petit déj (eau chaude / choco en poudre dégueu + un biscuit) avec les courses achetées la veille. Une douche et me voilà parti pour mon test de chinois. Bon il est prévu pour huit heures et demie et je me pointe à huit heures et demie, mais... je ne suis pas en retard ;)

J'aperçois pour la première fois depuis mon arrivée Marie-Astrid (qui est pour ceux qui l'ignorent celle de ma promo de Sciences Po avec qui je pars à Beijing) parmi la vingtaine d'élèves étrangers. Pas le temps de se dire quoi que ce soit car à peine arrivé, on nous répartit dans une salle. On a droit à un mini speech en chinois auquel je ne comprends qu'un mot sur dix, mais la dame à l'air gentille. Elle nous distribue quelques feuilles agraphées et tout le monde se met à plancher. Première page : je ne comprends strictement rien du tout, tout juste si j'arrive à reconnaître un caractère de ci de là. Je regarde la deuxième page : ce sont les consignes, en anglais. Je me rends alors compte que la première feuille contenait les consignes en chinois... Champion Toinou ! Troisième page, ça commence ; en gros, ce sont des QCM. Je comprends la première phrase, et je réponds en sachant que c'est bon. Je regarde la deuxième, que je comprends à moitié, je réponds au pif, tout comme la troisième et la quatrième. Les cinq dernières, je ne comprends pour le coup rien. J'attaque le deuxième exercice. Heureux d'avoir compris la consigne en chinois (plus par déduction en regardant l'exercice que par compréhension de la consigne...), je regarde la première phrase. Tous les caractères me sont inconnus. Je lis les suivantes, idem. Du coup je réponds toujours au hasard. C'est la même chose pour les cinq exercices suivants, où pour le coup, j'arrête carrément de répondre, puisque ça ne sert pas à grandchose. Un coup d'oeil au dernier, où je dois me présenter. L'exercice type que l'on fait depuis le lycée en chinois. A coeur joie, je m'y mets, tout en réalisant les conneries qu'on nous apprend pour le bac, puis après. Si tu vas en Chine, tu vas d'abord demander où manger avant de dire que ta soeur à 19 ans, mais bon...

Je me lève, rend ma "copie" avec honte, puis l'on m'indique une salle où une dame m'invite à m'asseoir en face d'elle pour tester toute l'étendue de mes capacités orales. Elle me débite une phrase ; je n'ai absolument aucune idée de ce qu'elle vient de me dire et attend de moi. Poliment, je lui esquisse un sourire niais. Et là, elle me regarde gentiment et me dit 'Ni hao'.   Gnnnéééé, non seulement elle me prend pour un débile, mais en plus, je suis un débile. 'Ni hao', je lui réponds. Comment t'appelles-tu ? On se croirait en seconde, j'ai honte. Moins de cinq minutes plus tard, elle me congédie gentiment en me disant que j'ai une très bonne oreille, et que je comprends très bien ce qu'elle me dit. Je cours rejoindre ma chambre, mais dans l'ascenseur, je me remémore ses paroles. Est-ce qu'elle se foutait ouvertement de moi ou voulait-elle simplement être gentille ? A moins qu'elle ne le pensait vraiment... Mais oui bien sur Toinou, d'ailleurs, je me demande pourquoi elle ne t'as pas demandé de lui donner des cours en chinois, tssss.

Comme j'ai finis avant Marie Astrid, je prends un hebdomadaire acheté à l'aéroport et vais le lire dans le hall en attendant. Quelques minutes plus tard, elle me rejoint et nous convenons d'aller nous balader cette après-midi ; rendez vous 13h devant la statue de Zhou En Lai qui trône devant l'entrée principale de l'école.

Il est un peu plus de dix heures et je rentre dans ma chambre. Toujours personne. Du coup, je me regarde un bon film sur mon ordi. Moins d'une heure plus tard, je suis interrompu par la porte qui s'ouvre. Mon coloc arrive, avec un grand sourire aux lèvres. Il est suivi de près par une jeune femme d'une bonne vingtaine d'années. Quelle n'est pas ma surprise lorsqu'elle me salue dans un français impeccable. J'apprends au fil de la conversation qui suit qu'elle est Ghanéenne, revient aujourd'hui de vacances en France, et était ici depuis deux ans où elle s'est liée d'amitié avec Michael. A peine rentré dans la chambre, ce dernier me tend un sachet en claironnant dans un anglais un peu tremblant : en Chine, on a coutume d'offrir des cadeaux aux nouveaux ! Une bière bien fraîche que j'ouvre sans tarder. Je devine qu'il rentre de soirée et qu'il n'a pas dormi de la nuit. Il doit en avoir emmagasiné pas mal depuis hier soir. Ca ne l'empêche pas d'en ouvrir une nouvelle qu'il répartit dans deux chopines à lui, une pour lui, une pour son amie. Tous les trois nous trinquons, et son amie, Naïke, entame la conversation en français avec moi. Michael quant à lui, met du reggae sur son ordi. Complètement éméché, il commence à essayer de nous parler en français. C'est excellent car tout ce qu'il sait dire se résume à "Comment ça va ?" et "Ca va, ça va bien", ce qu'il répète une douzaine de fois pendant que Naïke et moi parlons. La bière et le reggae délient les langues et j'apprends pas mal de chose. C'est une grande amie de Michael, qu'elle connait depuis deux ans. Ils ont énormément de souvenirs ensemble, et notamment de souvenirs de soirées et de bons moments plus ou moins alcoolisés. Michael qui ne comprend rien à ce qu'on raconte (en français) commence à danser et à imiter le guitariste avec ses bras, il est excellent. Pour autant, Naïke me confirme qu'à part les moments comme ça, il est du genre sérieux. Bon à savoir, un bon vivant, mais qui n'oublie pas de bosser. Que demander de mieux ? J'apprends que Naïke a passé ses dernières années (avant d'arriver en Chine) dans le Nord, à Roubaix, mais aussi à Porte d'Arras (grosse blague). On est interrompus par un 'Comment ça va ?" particulièrement sonore de Michael qui se sent un peu exclu. Il commence à nous raconter ses frasques sexuelles. Je souris, et son amie l'engueule en lui disant d'aller dormir. Je regarde ma montre et constate qu'il est bientôt une heure. Je consulte mes mails et vois un message de Marie Astrid qui me dit plutôt vers 14h. Pas de problèmes, je retourne me poser dans la chambre dans la bonne ambiance. Pour fêter ça Michael nous offre encore à tous une bière qu'il sort d'on ne sait où. Deux cannettes de 50 cl, je commence doucement à être gris. C'est agréable, écouter Bob Marley chanter tout en riant aux conneries de Michael... On continue comme ça pendant encore une petite heure, puis je les quitte pour aller manger. 

Il est 13h30 et la cafet' est fermée. Pas grave, je me dis que je vais essayer un petit restau dans la rue de la CFAU. Jusqu'ici je n'ai pas eu de problèmes avec l'arachide, alors autant passer à l'étape deux. Le boui-boui est miteux, le menu en caractères uniquement, je vais me fier à ma bonne étoile. Voyant le client devant moi commander de la soupe, je l'imite, et l'accompagne d'une espèce de sandwich au sésame et au boeuf. J'examine la soupe d'un air circonspect : je décèle des herbes, des pâtes, jusqu'ici tout va bien. De la viande aussi et là mon sourire commence à s'effacer : je vois une espèce de tentacule de poulpe grise surgir au détour d'un bouillon, suivie de près par un morceau de viande rose qui m'a tout l'air d'être un abat. Je serre les dents, mais je me dis que je suis en Chine pour faire des découvertes et que l'intolérance ne saurait être tolérée. J'avale donc un tentacule... Indéfinissable. Pas dégueu, mais pas super non plus. Je passe au bout rose... c'est bien un abat. Mon estomac a du mal, mais il engloutit sans contester. Comme je ne m'attends pas à voir de l'arachide dans la soupe, je bois quasiment les trois quarts. Et là... je sens mes lèvres commencer à frémir. Je les tâte, inquiet, mais oui, pas de doutes, elles sont bien gonflées. Pas juste le bout des lèvres comme d'habitude, mais toutes la surface. Je commence à paniquer, quand je sens quelque chose au niveau de ma gorge. C'est pas que je n'arrive plus à respirer, mais je sens qu'il y a quelque chose. C'est le moment que choisit un chinois pour s'asseoir à ma table, en face de moi. Complètement alarmé, je sors le plus vite possible mes Solupred que j'ai toujours sur moi et les dilue rapidement dans un verre que je me dépêche d'engloutir. Toujours ce sentiment d'oppression, angoissant. Je quitte précipitamment le restau qui a voulu ma mort, en me disant que le chinois en face de moi, voyant tout ce que je laisse intact va se faire une mauvaise opinion des occidentaux. Pas le temps pour les regrets, tant pis pour lui.

Je gagne ma chambre le plus vite possible, jette un coup d'oeil à Mike qui dort dans son lit comme un bébé et me regarde dans le miroir : yeux rouges, traits tirés, lèvres gonflées, je suis un peu inquiétant. Ni une ni deux, je plonge la tête dans les toilettes et me mets les doigts dans la gorge. Il faut que ça sorte de mon corps pendant qu'il en est encore temps. Je me relève avec une tête pas possible, mais ça m'a fait du bien, du coup, je remets ça. Je manque de boire l'eau du lavabo avant de me rappeler qu'elle n'est pas potable, et vais chercher une bouteille pour me rincer le visage et la bouche. Un coup d'oeil à ma montre, 14h10. Désolé pour le retard Marie Astrid, mais je suis un peu en train de mourir là. Jamais je n'ai eu une crise d'allergie aussi forte et des dizaines de questions défilent dans ma tête : A partir de quand appeler l'hôpital ? Où l'appeler (je n'ai toujours pas de téléphone) ? Comment dit-on hôpital en chinois ? Est-ce que mon état empire ou se stabilise ? Est-ce que c'est la panique ou j'ai vraiment du mal à respirer ? Tout vas très vite, et je prends une douche rapide pour me calmer. Vomir m'a fait du bien, la douche aussi, mais je suis toujours enflé au niveau des lèvres.

Je finis par rejoindre Marie Astrid, qui m'accueille par un "14h20, t'es gonflé" (non je rigole). Je lui demande de me signaler si mon état évolue sans que je m'en aperçoive, et nous prenons un taxi pour le parc de Beihai. Il nous dépose un peu avant, donc on essaie de se démerder pour finir à pied, mais entre deux, on tombe sur ce qu'on découvrira plus tard comme la sortie de la Cité Interdite. Le bâtiment est à couper le souffle, mais pour y rentrer il faut faire le tour (soit facile un kilomètre). On se retourne, et aperçoit une espèce de temple coloré niché sur une colline derrière nous. C'est joli, et ça a l'air d'être au somment d'un parc donc on se laisse tenter. On nous réclame deux yuans et nous pénétrons dans ledit parc, appelé JingShan. Magnifique, on se croirait à l'Orangerie à Strasbourg ... avec des centaines de chinois en plus. Le parc s'élève vers ce qu'on appelle "la Montagne du Charbon". Lentement, nous montons les marches de la route parsemée de fleurs et d'arbres très jolis qui nous amène devant le temple. Le temple ou la vue, je ne sais pas ce qui nous marque le plus.

Commençons par le temple. Assez moyen pour un temple de Beijing, il est construit dans le plus pur style architectural chinois et brille de ses couleurs éclatantes. Turquoise, or, jade, nacre, c'est vraiment un assortiment des plus esthétiques. A l'intérieur, un immense Bouddha en or massif effleure le plafond. La vue quant à elle, est à couper le souffle. Nous sommes sur un des points qui dominent la capitale (si l'on exclut les derniers étages des plus hauts immeubles), ce qui nous offre une vue imprenable. Sur des kilomètres, au nord, au sud, à l'est ou à l'ouest, la ville s'étend, immense. Gratte-ciels ultra-modernes côtoient les bâtiments communistes, lesquels jouxtent des temples des temps immémoriaux. Sur une des photos que j'ai prises, on voit vraiment la superposition des différentes strates qui donne à la ville son aspect unique. Pendant un instant, on ne parle plus, presque abasourdis. Même mon allergie semble s'éloigner. Puis nous nous asseyons sur un banc et commençons à discuter tranquillement au sommet de cette ville magique. Je suis un instant des yeux ce qui ressemble à une touriste chinoise, qui porte un T-Shirt fluo aux inscriptions européennes et des Ray Ban. Elle rentre dans le temple, s'agenouille devant le Bouddha, et prie en se relevant régulièrement. Chine magique...

Puis nous revenons sur terre et décidons de rentrer. Cette fois-ci, on tente le métro, que je n'ai encore jamais essayé. Deux yuans le ticket, quand je pense que le rickshaw de la veille m'en a extorqué cent pour quasiment le même trajet... Grrr. Première surprise, comme à l'aéroport, on fait passer ses sacs aux rayons X avant de pouvoir entrer. Le métro est (encore une fois) immense, et extrêmement moderne (je crois qu'il a été fait pour les Jeux de 2008). Toutes les inscriptions sont sous-titrées en anglais, ce qui simplifie grandement les choses. Nous nous engouffrons dans une rame pour le coup bondée. Ca peut paraître un peu amusant au début, mais quand il y en a un qui a des problèmes de digestion, c'est moins marrant pour tout le monde. Marie Astrid me quitte, son appartement étant avant la CFAU. Seul je continue mon périple. J'entends une forte musique dans la rame : pensant aux accordéonistes du métro parisien, je cherche des yeux le musicien en jetant un coup d'oeil par dessus mon épaule. Avec la foule, je n'aperçois rien du tout. Puis je vois quelqu'un au sol "ramper", je ne saurais le décrire autrement, parmi les jambes des passagers leur demandant de l'argent. Pendant quelques secondes, je reste incrédule, rapidement réveillé par une bande de lumière par la fenêtre du métro. Oui, ce sont bien des pubs qui défilent devant les vitres du métro alors que celui ci avance.

Je finis par rentrer dans ma chambre où je trouve Michael, à peu près dans la même position où je l'ai laissé à 14h. Il est actuellement 22h et il n'a toujours pas bougé. Brave petit...

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Commentaires
B
Bravo! bons réflexes.Le Solupred, une merveille à ne pas quitter d'une semelle, surtout quand on joue les touristes dans un pays où on comprend pas très bien la langue.<br /> <br /> Cela dit bonne nuit et, j'espère à demain sur Skype vers 13/14h.<br /> <br /> Bisous; on t'aime
Un français à Beijing
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