Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Un français à Beijing
11 septembre 2012

10 septembre, jour 10 :

10 septembre, jour 10 :

 

Le réveil est brutal : la porte claque et Michael rentre. Un bref coup d'oeil au réveil : il est cinq heures du matin. Tranquillement, il se pose à son bureau, allume son ordi, met de la musique (il garde quand même les écouteurs). Ca fait une sacré lumière, mais le pire, c'est qu'il commence à chanter et à siffler. Je jette un nouveau coup d'oeil au réveil : non, je n'ai pas rêvé, il est bien cinq heures, et lui siffle comme si de rien n'était. D'après ce que je comprends, le Mozambique a battu le Maroc 2-0 (désolé Saïd), et il a passé la soirée et la nuit à fêter ça. Et on dirait bien qu'il n'a pas fini, car il appelle un de ses potes, et commence à parler normal. Il est cinq heures et demie du matin, et le jour se lève. Je crois à chaque instant qu'il va aller se coucher alors je ne dis rien, mais les minutes s'écoulent les unes après les autres, et il est toujours aussi bourré. Au bout d'une heure, j'en peux plus et je lui hurle de se taire. Il entend à moitié avec son casque sur les oreilles, mais s'excuse vaguement et se tait... quelques minutes. Au bout d'un quart d'heure, il m'a déjà oublié et s'entame une bière. Je finis finalement par me rendormir, mais quelques heures plus tard, je me réveille à nouveau : il n'a pas bougé, toujours sur son ordi. Il est neuf heures et demie ; mais quand est-ce qu'il va s'endormir nom de *** ! Je somnole jusque midi, et me met devant le dernier épisode de la saison de Rome. Entre temps, il s'est couché et dort paisiblement. La saison finie, je me lève, prends une douche et quitte la chambre non sans avoir claqué la porte avec fracas.

Après mon week-end amorphe, je me dis quand même qu'il serait bien que je sorte un peu de ma chambre. Au programme j'ai prévu de commencer la journée (il est quand même treize heures) par des courses à Carrefour, avant de me rendre dans le quartier des étrangers de Beijing, appelé Sanlitun, dans l'espoir de trouver du Nesquick ou tout du moins une alternative à la mixture immonde qui me fait office de chocolat chaud le matin. Je choisis de ne pas déjeuner et me rend d'abord à la cafétaria pour prendre mon repas du midi. Malheureusement, les chinois mangent tôt, et à treize heures dix, la cafét est déserte. Tant pis, je me démerderai autrement.

Deuxième étape, Carrefour : comment m'y rendre. Je me dis qu'il est mieux de ne pas choisir la facilité en prenant un taxi (3-4 euros), et me décide donc à reprendre un bus (15 centimes), comme nous avions fait avec Michael la semaine dernière. Problème, je n'ai pas retenu le numéro du bus ni l'arrêt. Je regarde rapidement sur Internet les bus qui desservent l'arrêt Carrefour et les note sur mon portable. Je me rends ensuite à l'arrêt où nous avions attendu le bus Michael et moi la semaine dernière. Une dizaine de bus différents s'y arrêtent. Je croise les numéros que j'y aperçois et ceux que j'ai notés et, j'ai de la chance, un seul concorde : le 319. J'espère qu'il m'emmènera bien à Carrefour... Quelques minutes plus tard, je le vois arriver et se garer devant l'arrêt. Je ne sais pas trop par laquelle des deux portes (celle de devant ou celle du milieu) entrer, donc j'hésite une demie-seconde. Je m'avance vers la porte de devant, mais j'ai à peine fait un pas que les deux portes se ferment ... et le bus s'en va, me laissant comme un idiot devant l'arrêt. Bon, encore une nouveauté que je vais devoir intégrer : les bus s'arrêtent environ cinq secondes avant de repartir, donc vaut mieux ne pas rater le coche. Quelques minutes plus tard, un nouveau 319 fait surface, mais cette fois-ci, c'est un bus à étage. J'hésite un peu, mais pas assez longtemps pour le louper à nouveau. Une fois dedans j'essaie de repérer un éventuel arrêt Jialefu (Carrefour), mais le bus est tellement plein que j'arrive à peine à voir par la fenêtre. Je reconnais un grand mausolée que je me rappelle avoir déjà vu la semaine dernière. Plutôt bon signe. Le bus continue sa route, s'arrêtant régulièrement. Lors de l'arrêt suivant, au moins vingt personnes descendent. Je jette rapidement un coup d'oeil et, oui, c'est bien celui là. Rapidement (pas envie de me faire avoir deux fois), je me fonds dans la masse qui descend, et empoigne un caddie.

Le spectacle est moins étonnant, mais toujours aussi impressionnant. En plus de ça, les chinois pullulent : il y en a des dizaines, aglutinés à chaque rayon. C'est impossible à décrire ou à expliquer rationnellement, mais voir tant de monde, tout le temps, ça devient fatiguant et extrêmement lassant. Mais bon, cette fois, je suis tout seul, donc je vais pouvoir étudier plus attentivement le magasin et rechercher avec plus de précision ce que je souhaite, à savoir du Nesquick (priorité n°1), du (vrai) pain, des biscuits au chocolat, et de quoi faire quelques repas moi-même les soirs où j'ai la flemme de descendre manger. La pêche est bonne pour le pain (je trouve un pain de mie des plus rassurants), les biscuits (je déniche même des Oréos) et les repas tout-faits (des soupes, des pâtes et de la viande séchée), mais malheureusement, je me casse encore les dents pour le Nescquick. Plus grave, je découvre qu'il n'y a qu'un modèle de poudre chocolatée, celui qui j'ai actuellement. Bigre, les petits déj' vont être lugubres...

J'ai l'essentiel, je paie à la caisse, quand je me rends compte que mon ventre gargouille. J'avise un espèce de restaurant fast-food qui propose des pâtes dans la galerie marchande de Carrefour et y fait halte. Je commande un plat de pâtes, que la serveuse confectionne devant mois : spaghettis, concombres en fines lamelles. Elle ajoute même la sauce avant de saupoudrer le tout ... de cacahuètes. Chouette alors des cacahuètes ! Je lui fais comprendre que je suis allergique, du coup elle me refait un plat, mais avec les mêmes gants en plastique que pour le plat qu'elle vient de me faire. Je crains donc qu'il reste des bouts ou de l'huile de cacahuètes sur ses gants... et sur mon nouveau plat. Faisant ma prière devant mes pâtes, j'engloutis une bouchée. Réaction immédiate : le gout. Impossible à décrire, une fois de plus. Ce qui me vient à l'esprit, c'est le citron, mais le goût n'est pas acide. Je pense que c'est la fraîcheur des concombres mêlé avec un gout très prononcé de je-ne-sais-quoi. Fort, étonnant, mais pas forcément mauvais. N'empêche que mes lèvres réagissent immédiatement et me piquent très fort. Génial, je vais encore mourir. Sauf que cette fois, je n'ai avalé qu'une ou deux bouchées, donc ça devrait limiter les dégâts. Toujours est-il que je quitte le restau, ayant à peine touché à mon plat, et laissant encore une fois une belle image de l'Occident : je refuse le premier plat qu'on me donne et entame à peine le second. Mais bon, je pense qu'ils préfèrent une assiette à peine entammée à un cadavre encore chaud dans leur restaurant.

J'essaie de repérer les bus de retour, m'inquiétant de mon état. Foutus bus, il y en a quinze mille, mais pas le mien ! Au bout de dix minutes, je finis enfin par trouver l'arrêt... et me rendre compte que mes lèvres ont arrêté de piquer. Etrange. Soit c'est du au fait que je n'en ai mangé que très peu (peu probable), soit c'est simplement une épice du plat qui a fait réagir mes lèvres, mais pas du tout de manière allergique. Génial, je viens encore de perdre 15 yuans pour un repas que je n'ai pas mangé, et je crève de faim. Pas le temps de me lamenter plus longtemps car le bus arrive. Je me démerde pour m'arrêter devant la fac, et prend l'ascenseur pour poser mes courses dans ma chambre avant de repartir. Quand j'arrive dans le couloir, je vois notre chambre la porte grande ouverte et la lumière allumée. Deux dames de service sont en train de tout nettoyer, aspirateur, serpillères et tout le tralala. Je me demande où est Michael, avant de l'apercevoir toujours dans son lit, alors que les dames sont en train de nettoyer. Yaaaa, il le bouffe bien, j'espère qu'elles vont rester longtemps et faire plein de bruit. En attendant, moi je pose juste mes courses sur mon bureau avant de repartir, plus affamé que jamais.

Cette fois-ci, je prends le métro, direction Sanlitun, le quartier étranger. C'est assez loin d'où j'habite, et même une fois sorti du métro, il y a encore une trotte à pied. N'empêche, on voit tout de suite où on est : je croise plusieurs têtes blondes et non-bridées, ce qui ne m'arrive jamais dans mon quartier. Je continue vers Sanlitun, et marche pendant environ une petite demie-heure. La pollution est perceptible, et vraiment insupportable, j'ai l'impression de préparer mon cancer du poumon. Je finis par tourner à gauche et marcher pendant quelques minutes ; aucun doute je ne suis plus très loin : les voitures se font de plus en plus luxueuses, et (c'est dur à dire), les gens aussi. Je croise quelques embassades, dont celle du Canada (Oh, Canada), et j'arrive dans l'équivalent de la rue Solférino : la rue avec tous les bars. Je la remonte et déboule dans le fameux "Sanlitun village".

Ce "Village" est en fait une juxtaposition de magasins européens dans le luxe et l'apparat rivalisent outrageusement : Nike, Puma, Louis Vuitton, Mont Blanc, Emporio Armani, Versace, Sergio Rossi, sans oublier bien sur Apple. Ce dernier est un magasin immense où des dizaines de chinois sont aglutinés. C'est vraiment excellent, le magasin est véritablement plein sur deux étages de chinois et de chinoises qui tâtent et manipulent Ipads et Iphones, très en vogue chez la jeunesse pékinoise. Bien entendu, tous les magasins ont leur enseigne en anglais, (ce qui est très rare ailleurs) voire uniquement en anglais. Le luxe, tant écoeurant qu'il soit, a du bon : je dégote un café italien, où je commande (enfin !) un chocolat chaud, un vrai. Quel n'est pas mon bonheur de voir arriver un verre énorme, couronné de crême Chantilly généreuse et drappée d'un coulis de chocolat. Mmmmh ! Une fois ce plafond délicieux crevé, je m'attaque pour de bon au chocolat chaud. Un délice. Je ne sais pas si c'est parce que je crève de faim ou si c'est parce que mon dernier chocolat chaud remonte à plus de dix jours, mais pendant quelques secondes, c'est l'extase.

Je reviens finalement sur terre pour observer les gens qui m'entourent et défilent dans la rue. Principalement des chinois quand même, mais énormément d'occidentaux aussi. Je sais que le but de mon voyage est de me mêler au monde chinois, de comprendre le mieux possible cette civilisation et de m'ajaunir, mais pour l'instant, tout ce que ça m'a apporté, c'est une allergie carabinée. Alors oui, ce monde que j'ai devant moi, n'est qu'apparence, luxe et occidentalisme, mais il est parfois confortable voire agréable. Heureusement pour moi, il est assez éloigné de la CFAU, et je ne pourrai y retourner facilement. Tant mieux, ça m'incitera à côtoyer plus la "vraie Chine", celle qui crie, qui pue, et qui crache... Je ne sais pas si on sent la lassitude à travers mes propos, mais un sourd ras-le-bol me submerge de plus en plus. Et je ne suis là que depuis dix jours... Qu'est-ce que ça va être au bout de trois mois ! J'avoue que je ne me sens pas trop dans mon assiette ces derniers jours. J'y ai bien réfléchi, et ma conclusion est que : ce qui me fait le plus souffrir et ce qui me manque le plus, c'est la tendresse. Une tendresse familiale, amicale ou amoureuse. Je suis ici, perdu au milieu de millions de chinois, et les seules relations que j'ai avec mon entourage sont des relations commerciales, administratives ou hypocrites. Des relations purement intéressées, dénuées d'affection ou d'amour. Je ne serai là que pour un mois, je pense que je n'y penserais même pas, mais le fait que ce soit pour un an... c'est dur.
Bref, finie l'élégie morose, il est temps de lever le camp et de rentrer "à la maison" (et quelle maison...). La route est longue, et il commence à faire noir, mais je réussis quand même à retrouver le métro. Arrivé à l'université, je m'aperçois qu'Internet ne fonctionne plus. En effet, je l'avais commandé pour une semaine... il y a une semaine. Je me rends donc à l'accueil pour payer pour un mois, mais on me fait comprendre qu'on ne peut mettre Internet dans les chambres qu'entre neuf heures et dix-sept heures. Génial, en plus de ça, je ne vais même pas pouvoir parler à ceux que j'aime. J'arrive quand même à joindre mon père pour le prévenir qu'on ne pourra pas se voir sur Skype aujourd'hui et, même si on ne se comprend pas bien au téléphone, entendre sa voix chaleureuse me réchauffe le coeur. Alors que je suis en train de rédiger mes mémoires, ma poche vibre. Tiens, premier appel sur mon téléphone : numéro inconnu. Intrigué, je décroche et, quelle n'est pas ma surprise d'entendre à des milliers de kilomètres la douce voix de mon amoureuse. Une fois de plus, une vague de bonheur et d'émotion m'assaille et se prolonge le temps de la conversation. Qu'est-ce que c'est agréable la tendresse et l'amour ! C'est un récit un peu spécial que je vous fais aujourd'hui, mais je le conclurai en vous disant une chose, à vous tous qui lisez ce blog : JE VOUS AIME.

(et non ce n'est pas mon testament).

Publicité
Publicité
Commentaires
F
tiens bon petit toinou! on t'aime et on pense TOUT LE TEMPS à toi!!!plein de gros bisoux salés et ensoleillés(sans cacahuète!).flo
R
J'ai trois choses à dire :<br /> <br /> <br /> <br /> 1) J'aime beaucoup le commentaire ET le pseudo de Saïd (j'espère que tu vas bien Saïd, en passant).<br /> <br /> <br /> <br /> 2) Haha ! J'ai noté que c'était dans un café italien que tu avais bu ton chocolat chaud. Viva l'Italia ! Non ? Bon d'accord. <br /> <br /> <br /> <br /> 3) Je t'aime. Je voulais pas mettre ça en commentaire, mais c'est plus fort que moi. <br /> <br /> <br /> <br /> Courage petit ours chinois, plus tu profites, plus le temps passe vite. T'auras à peine le temps de dire Ni hao qu'on sera tous ensemble.
T
Gagner contre le Maroc, ce n'est pas difficile!<br /> <br /> Tu peux dire à ton camarade qu'il n'y avait pas de quoi se réjouir. <br /> <br /> <br /> <br /> Petit coup de blues Toinou! Je pense qu'avec l'habitude, les cours, tes futures soirées et sorties, ça passera. En tous cas, je l'espère. <br /> <br /> <br /> <br /> Pour te réconforter, dis toi que tu dois être certainement plus grand que la plupart de tous ces chinois, ce qui doit te changer :)
Un français à Beijing
Publicité
Archives
Publicité